mercredi, décembre 19, 2012

Le mystère autour de la mort du pharaon Ramsès III s'éclaircit



IRIB- Après 3.000 ans, la lumière est faite sur la "conspiration du harem", qui a coûté la vie au pharaon Ramsès III. Selon une nouvelle série d'analyses, celui-ci a été égorgé.

Grâce à une analyse aux rayons X et à des tests ADN, des chercheurs ont pu lever le voile sur la mort de Ramsès III : le pharaon a eu la gorge tranchée. La "conspiration du harem", comme elle a été appelée, a été organisée par des membres du harem du pharaon comme en atteste des documents d'époque, en particulier le "Papyrus judiciaire" conservé à Turin et qui relate une tentative de coup d'État de la reine Tiyi, l'une des épouses de Ramsès III.
Il y a 3.000 ans, Tiyi souhaitait voir son fils Pentaour monter sur le trône alors que l'héritier légitime de Ramsès III était le fils d'Isis, sa première épouse. La reine Tiyi espérait ainsi mettre à profit l'hostilité croissante du peuple à l'égard du pharaon, qui vivait dans le luxe, alors que les ouvriers n'étaient plus payés et que la famine menaçait. Ce mécontentement donnera d'ailleurs la première grève de l'histoire, rapporte l'AFP. Pour mettre au point son complot, Tiyi, bien que cloîtrée dans son harem, est parvenue à entrer en contact avec des gens à l'extérieur, impliquant ainsi des militaires et même un prêtre.

Une importante blessure à la gorge révélée

Les détails exacts ne seront probablement jamais précisément connus mais, d'après des documents officiels de l'époque, la tentative de coup d'État a échoué en 1156 av. J.-C et une trentaine de coupables ont été condamnés. En revanche, les textes restent flous sur la mort de Ramsès III, alors âgé d'environ 65 ans. La question restait ainsi posée : le pharaon a-t-il été assassiné par les sbires de Tiyi et de Pentaour ou a-t-il été blessé avant de mourir quelques jours plus tard ?

Pour y répondre, le spécialiste allemand des momies, Albert Zink, s'est intéressé à la dépouille de Ramsès III. Avec l'aide d'autres experts, dont Zahi Hawass, ancien responsable du Conseil suprême des antiquités égyptiennes, il a passé la momie à la tomographie assistée par ordinateur. L'autopsie numérique a ainsi permis de révéler une importante blessure à la gorge, sous le larynx, qui était jusque-là passée inaperçue. "La blessure fait environ 70 mm de large et s'étend jusqu'aux os [ ... ] La trachée a été coupée net" à l'aide d'un couteau tranchant ou d'une lame similaire, précise l'étude, publiée par le British Medical Journal.

"L'étendue et la profondeur de la plaie indiquent qu'elle a provoqué la mort immédiate de Ramsès III", révèlent donc les chercheurs. Plus surprenant encore, l'imagerie médicale en 3D a identifié un corps étranger enfoncé dans la plaie : une amulette en pierre. Il s'agit de "l'Oeil d'Horus", auxquels les Égyptiens prêtaient des pouvoirs de guérison. "La gorge tranchée et l'amulette prouvent clairement que le pharaon a bien été assassiné", indique Albert Zink dans un communiqué repris par l'AFP.

La momie de Pentaour retrouvée ?

Mais ce n'est pas tout puisque les experts se sont également intéressés à la momie d'un homme de 18 à 20 ans retrouvée en compagnie de celle de Ramsès III. Celle-ci était enveloppée dans des peaux de chèvre, une matière "rituellement impure". Il s'agirait probablement de Pentaour le parricide, contraint au suicide. Les peaux de chèvre l'auraient privé d'une vie après la mort, suprême humiliation dans l'Égypte antique.

L'analyse ADN a révélé que cette momie est bien celle d'un fils de Ramsès III mais pour être sûr qu'il s'agit bien de Pentaour, il faudrait disposer de l'ADN de la reine Tiyi, dont la momie n'a jamais été retrouvée.

lundi, décembre 17, 2012

La traite déclarée comme illégitime et immorale



Après avoir rappelé comment l’Église avait été silencieuse, complice et avait intégré l’esclavage et comment il avait attisé les conflits en Afrique, la troisième partie de l’article de Reynolds Michel explique comment la traite et l’esclavage furent condamnés.

Fernando Rebello (1546-1608) partage le point de vue de son confrère Luis de Molina sur le caractère injuste de la réduction des Noirs en esclavage. Car pour lui, les marchands mentent en déclarant que les Noirs qu’ils vendent ont été réduits en esclavage de manière licite. Dans un ouvrage publié à Lyon en 1608, il déclare que la traite des Noirs en Afrique est illicite et immorale. En conséquence, les esclaves embarqués injustement doivent retrouver la liberté. Il va jusqu’à dire qu’ils doivent être indemnisés. En outre, ceux qui, s’étant rendu compte de l’injustice de l’origine de leur esclavage, ne les ont pas relâchés sont un état de péché mortel.
D’autre part, avec Enrique de Villalobos, il met en cause une certaine logique chrétienne qui justifie l’esclavage sous couvert d’évangélisation. Si tel est le but, quelle est la légitimité de les maintenir en esclavage lorsqu’ils sont baptisés ? Comme l’Eglise ne peut accueillir en son sein que des hommes libres — la libération des esclaves baptisés était alors la règle en Europe — maintenir les Noirs baptisés en esclavage constitue une faute grave. Fernando Rebello ose prendre comme élément de comparaison l’islam qui accorde la liberté à tout esclave qui se convertit à la foi musulmane.
Il s’est également opposé au baptême donné aux Noirs avant leur embarquement sur les navires négriers. Car une fois débarqués, les maîtres, qui se disent pourtant chrétiens, ne cherchent nullement à les éduquer dans cette foi qu’on leur a imposée, mais a les faire travailler jusqu’à l’épuisement. C’est là une grave offense à la religion.
C’est la raison pour laquelle le jésuite Diego de Avendano (1594-1688) refuse l’absolution aux détenteurs d’esclaves qui ne cherchent pas à éduquer leurs Noirs selon les principes catholiques (1).
Une place à part doit être faite à Fernando Oliveira (1507-1580), dominicain portugais en rupture avec son ordre. Même s’il raisonne également dans le cadre de la « guerre juste », guerre légitimée par des causes très précises, établies par les théologiens-juristes de l’École de Salamanque, donc ne remettant pas en cause l’esclavage sous certaines conditions, Fernando Oliveira, homme de lettres, grammairien et spécialiste d’art nautique, a une position plus tranchée sur la traite des Noirs qu’il condamne radicalement. La traite est une affaire de commerce qui n’a absolument rien à voir avec la « guerre juste ». D’où sa condamnation de l’esclavage qui en découle, un esclavage par transaction mercantile qui « n’a aucune cause raisonnable pour ce qui nous concerne, car ils ne nous offensent pas, ils ne nous doivent rien, et nous n’avons pas de cause juste pour leur faire la guerre. Sans guerre juste, nous ne pouvons pas les capturer ni les acheter à des gens auxquels ils n’appartiennent pas ».
L’être humain libre et pacifique ne peut pas être l’objet d’un commerce« comme qui achète et vend des animaux ». Et il s’emploie à répondre à certaines objections : « ce n’est pas une bonne excuse de dire qu’ils se vendent les uns les autres, car il est assurément coupable celui qui achète ce qui est vendu à tort et les lois humaines de notre pays et d’autres le condamnent, parce que s’il y avait pas d’acheteurs, il n’y aurait pas de mauvais vendeurs et les voleurs ne voleraient pas pour vendre. De sorte que nous leur donnons l’occasion de se tromper les uns les autres, de se voler, de se faire violence et de se vendre en allant les acheter. (…) C’est nous qui avons été les inventeurs d’un commerce aussi pervers, jamais pratiqué ni mentionné parmi les hommes » (2).

Ces théoriciens membres de diverses congrégations ont eu la chance de se rendre en Amérique et de côtoyer la réalité de l’esclavage. Ils découvrent sur le terrain un autre type d’esclavage et l’horrible réalité de la traite : des Noirs bestialisés et martyrisés et des milliers de morts. Ils estiment en conséquence que la plupart des justifications classiques ne peuvent s’appliquer à cette nouvelle réalité. Malgré leur grande prudence, ils finissent par alerter les consciences :

- en dénonçant l’hypocrisie des négriers qui se cachent derrière le motif religieux d’évangélisation pour se livrer à leur trafic ;

- en alertant les autorités sur les traitements infâmes que les maîtres infligent aux esclaves ;

- en contestant la légitimité de la traite ;

- et en désapprouvant l’esclavage tel qu’il est pratiqué.
Ces prises de position ne pouvaient pas ne pas avoir un certain impact sur un certain nombre de missionnaires et de théoriciens chrétiens en les poussant à aller plus loin dans leur condamnation de la traite et de l’esclavage.
(à suivre)
Reynolds Michel
(1) LE BRET Marie, Arguments et pratique de l’anti-esclavagisme catholique dans l’Amérique latine coloniale (XVe-XVIIIe siècles), Colloque 2010, Institut Albert le Grand, IRCOM, pages 18 à 25 pour toutes références sur les Théologiens - juristes de l’Ecole de Salamanque et autres. Également QUENUM Alphone, op.cit, pages 105à 111.
(2) Ibid.

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